Les réseaux anarchistes et Félix Fénéon

Publié le par Paul-Henri Bourrelier

Communication de Philippe Oriol, chercheur spécialiste de l’anarchisme, auteur d’une biographie de Bernard Lazare, auteur d’une Histoire de l’affaire Dreyfus (en trois volume, le premier est paru en 2008)

RESUME

Philippe Oriol traite d’abord des rapports entre le symbolisme littéraire, qu’il préfère nommer jeune littérature, et l’anarchisme. On fait souvent débuter l’histoire de ces relations à 1890-1891 qui est le moment fort de la création des revues − la Revue Blanche mais aussi le Mercure de france, Les Entretiens politiques et littéraires, la plus anarchiste, La Plume et d’autres comme la Revue Rouge, L’Aurore où on trouve Rictus et Barbusse, Vendémiaire animée par Pujo, Les Essais d’art libre de Roinart etc. Il faut en fait remonter aux années 1880 à Montmartre, notamment dans le cercle de La Butte où débute Antoine, où on voit Malato, grande figure de l’anarchiste, Pouget…, ainsi qu’à la revue Le Décadent avec Baju. En 1890, l’anarchisme adopte un discours élitiste celui de Barrès dans Un Homme libre visant l’isolement artistique, les postures libertaires, le vers libre. L’apogée de ce mouvement sera la Librairie de l’art indépendant de Bailly où les démonstrations mystico littéraires se donnent libre cours, où le Sar Péladan fait  figure d’anarchiste. En 1892-1893 deux courants se séparent avec la polémique sur l’Art social dans laquelle Lazare, suivi par Fénéon et Mecislas Golberg, défend des exigences sociales quasi socialistes (lire à ce sujet Les Porteurs de torches.). ; de l’autre courant se détacheront des tendances droitières qui seront lors de l’affaire Dreyfus aux sources de l’action française.


Fénéon.  Les écrits de Félix Fénéon secrétaire de rédaction, pilote et inspirateur de beaucoup de pages de la Revue Blanche, sont rarement signés ; ils sont mal représentés par le recueil des Œuvres plus que complètes, comme l’est sa vie dans le récit romancé qu’en fait Joan Halperin : celle-ci donne par exemple tous les détails d’un attentat au restaurant Foyot devant le sénat qu’il n’a vraisemblablement jamais commis.− il y a quantité d’autres explications possibles ; on aura probablement les clés de l’énigme quand les archives de l’Okrana s’ouvriront enfin. Au début de l’année 1894, suite au vote en décembre 1893 des lois dites scélérates (qui avec la troisième votée en juillet 1894 ne seront abrogées qu’en 1981), la police opère des arrestations massives, dont celle de Fénéon. Beaucoup d’anarchistes ou sympathisants comme Pissarro, Mirbeau, Lazare se réfugient temporairement en Belgique, et toutes les revues anarchistes disparaissent. Les accusés politiques sont acquittés au procès dit des Trente qui se tient au mois  d’août, ce qui met un terme à un ensemble d’opérations envisagées. La presse anarchiste reparaîtra un an plus tard à la faveur d’une amnistie, alors que les anarchistes se sont entre-temps infiltrés dans les syndicats. Lors de l’affaire Dreyfus, ils seront les premiers à se lever, et certains comme Mirbeau et Victor Barrucand seront des hommes clé du combat pour la révision. L’on reverra ensuite Fénéon, toujours là comme une ombre chinoise, au centre des réseaux mûris par l’Affaire.

 

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P
Avant la venue de Fénéon, la Revue Blanche avait ouvert ses pages à Ludovic Malquin,condisciple à Condorcet des membres de l'équipe de rédaction. Fénéon a susité la collaboration de Victor Barrucand,Zo d'Axa,Léon Remy,Achille Steens,Emile Pouget,Charles Malato,Tarrida del Marmol, Henri Dagan, Gaston Dubois-Desaulle, Alexandre Cohen ainsi que Elisée Reclus, Edmond Bailly.Louise Michel et quelques autres dans le cadre de l'Enquête sur la Commune, et Mecislas Golberg pour une traduction. Bernard Lazare, Paul Adam, Octave Mirbeau étaient des amis des Natanson.Parmi les illustrateurs, Vallotton, Maximilien Luce, Paul Signac, Charles Maurin affichaient des sympathies anarchsites marquées.
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